Longtemps, j’ai tenu la littérature en haute estime. Le loisir le plus noble, un passetemps intelligent. Pour se faire, il fallait que chaque livre lu apporte un soupçon d’intelligence et de finesse, torde le cerveau dans tous les sens et me révèle quelque chose du monde.
J’en venais à me désoler de certains livres au succès selon moi immérités, tant leur contenu était insipide ou cousu de fil blanc.
Quelle suffisance ! Quelle prétention !
On frôlait l’intolérance. Au nom de quoi ?
J’ai adouci le ton petit à petit. Je réagissais à chaque article lu qui dénigrait certains romans faciles, en me disant mais qui sont-ils pour jugés, non pas seulement l’œuvre mais a fortiori ses lecteurs? N’est ce pas insulter le lecteur que de crier à la bêtise d’un livre lu par milliers?
On ne voit pas la poutre qu’on a dans l’œil, c’est bien connu!
J’avoue que je continue à penser qu’il est plus intéressant, dans un salon du livre notamment, de mettre en avant des auteurs peu connus lors de conférence, pour que le public attiré par les têtes d’affiches les découvre. Partager le peu de médiatisation littéraire, s’il vous plait!
Je ne vais pas me mettre à aimer les romans que l’on retrouve entre de nombreuses mains dans le métro sous prétexte qu’il faut être tolérant, mais je ne jette plus l’opprobre sur les lecteurs de ces ouvrages qui finalement ne cherchent que du rêve, une façon de s’alléger le quotidien. Pourquoi vouloir du sombre face à un réel déjà violent?
Pour ma part, je cherche toujours le livre qui va me secouer, me tirer les larmes et que je vais refermer en ayant légèrement décalée ma vision du monde.
En réalité, tout cela est épuisant.
A cela s’ajoute un troisième œil, quand on commence à s’essayer laborieusement à l’écriture, chaque livre n’est plus seulement lu comme lecteur mais aussi comme constructeur de phrases, comme dénicheur de mots.
Le blog, aussi, accroît sans doute ce risque du lire pour écrire un billet. La publication quotidienne sur le blog virait à la tyrannie. Je n’ai jamais cédé à l’idée que sur le blog je ne devais parler que de livres à faible tirage ou peu connus pour ne pas entrer dans le moule. Si on commence à s’imposer de telles contraintes, alors ce blog ne nous ressemble plus et perd tout son sens. Cependant, on a envie légitimement de mettre en avant des auteurs dont Elle ou Lire ne parlent pas ou trop peu.
Alors, à certains moments, je me suis demandé si je n’étais pas en train de perdre le vrai goût de la lecture, celui qui n’existe que pour lui-même, sans arrière-pensée, sans analyse poussée. J’étais fatiguée de cette course sans fin pour trouver LE livre (je n’arrive toujours pas à savoir ce que j’attends DU fameux livre), cette frénésie de l’achat en librairie augmentant une pile à lire déjà considérable, toujours tournant le regard vers plus compliqué, plus travaillé, plus intello.

Sauf qu’un jour, on frôle l’overdose. On voudrait juste du futile, du léger, ne pas chercher comment la phrase est construite, ne pas acquieser devant une tournure de phrases que l’on croyait impossible. Juste lire pour se libérer, finalement pour se reposer.
Tout cela pour vous dire que je comprends de plus en plus l’envie de lire juste pour se détendre, pour s’évader de son quotidien. Ce n’est pas ma conception première de la littérature et je continue à vouloir que l’on me torture mais je m’accorde parfois le droit de lire un livre juste pour reposer mon cerveau, pour sourire en suivant les péripéties d’une héroïne attachante, me laisser porter par une histoire peu importe le style ou la forme, ne pas chercher la phrase- citation que l’on recopiera dans son carnet comme un talisman.
Et désormais je ne hurle plus quand je vois le top 5 des meilleures ventes. Évidemment, je le préférerais différent mais qui suis je pour juger mauvais et sans intérêt ce que des milliers de lecteurs estiment comme leur apportant bonheur et réconfort ? La littérature a plusieurs vertus, il ne faut pas l’oublier sous prétexte d’une grande vision du monde. Chaque auteur n’a pas la même raison d’écrire, le même rapport à son travail et au monde. Certains veulent le changer, d’autres veulent juste le rendre plus doux. Moins de naiveté ou de mièvrerie.
J’en vois se remuer sur le siège hurlant (haute estime de ce que provoque la lecture d’un de mes articles !) à la condescendance de cet article, à la bassesse et à l’inutilité de cette chronique. Sans doute.
Tant pis.
Pas de grande leçon, juste un point de vue! (qui correspond à la philosophie de ce blog, jamais de critiques négatives! A quoi ça sert? Il y a tant de choses passionnantes à présenter! Critiquer négativement, c’est toujours en parler… et prendre la place d’autres choses plus intéressantes)
La discussion est ouverte, faites vos jeux!
Et vous, pourquoi lisez vous?
Et surtout, rendez vous la semaine prochaine pour vous présenter une maison d’édition pour laquelle j’ai la chance d’être lectrice et qui offre des romans profondément optimistes et qui sauront accompagner vos envies d’évasion !