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Lire pour écrire

8 Sep

Le mois de septembre est chaotique, mon cerveau doit être disponible à 100% pour quelque chose que je dois finir. Il est parfois épuisé, jamais euphorique. Il faut le faire, voilà tout…. D’où ma faible présence sur le blog….

Ce texte a été publié pour la première fois sur la main enchantée le 28 avril.

Le hasard n’existe pas… Depuis quelque mois, je me retrouve en train de lire de nombreux romans dans lesquels soit le narrateur est écrivain soit l’auteur raconte sa vie et notamment son processus d’écriture, parfois insidieusement, parfois franchement , comme par exemple Foenkinos dans Les souvenirs et Delphine de Vigan dans Rien ne s’oppose à la nuit…

Au début, je pensais que mon choix était fortuit, j’ai un doute tout à coup… Je suis attirée par ce genre de livres… Va savoir pourquoi (euh si je sais un petit peu mais bon…)

Dans tout cela, il y a eu cinq livres vraiment axés sur ce sujet, la liseuse dont j’ai parlé ici, sur la vie romancée ( ?) d’un éditeur.

Deux autres plus « techniques » :

– Petits bonheurs de l’édition, journal de stage de Bruno Migdal: l’auteur stage chez Grasset. Un livre comme un journal intime sur les coulisses des maisons d’éditions, leurs travers mais aussi cette curiosité qu’elle procure, cette espèce d’aura des grandes maisons dans lesquelles bon nombre rêvent de voir leurs noms s’afficher sur les murs. Ce petit essai est très bien écrit, on pourrait croire à un roman. On n’apprend pas forcément beaucoup de choses mais Bruno Migdal parvient à nous faire ressentir l’atmosphère de la maison

– L’urgence et la patience de J P Toussaint sur le processus d’écriture et de lecture. Deux chapitres formidables sur des souvenirs de lectures intenses : Proust et surtout Crime et châtiment, son livre révélateur. Et un chapitre génialissime sur l’urgence et la patience dans l’écriture, sur ce qu’il faut vivre pour écrire. Cet essai est vraiment très intéressant, juste ce qu’il faut de technicité mais surtout de l’émotion, du ressenti. J’ai vraiment beaucoup aimé cette lecture car il est rare de lire cela : soit on est dans les conseils pour écrire (très technique sur la syntaxe, comment construire un personnage.. d’ailleurs ce genre de livres, je n’y arrive pas… Vous qui écrivez, vous avez lu ces livres conseils ? J’ai l’impression d’être face à un livre scolaire (un bémol sur cette critique pour le livre de Marianne Jaeglé et de Laure Pécher) pour une activité pourtant intime et profondément personnelle…) soit on est dans un roman mettant en scène l’auteur, ici on est face au créateur et à son travail.

– Le palais des livres dans lequel Roger Grenier revient sur qu’est qu’écrire et sur les raisons qui poussent à franchir le pas : pour être aimé, selon lui (hmm, pas faux, non ?). Il revient sur les doutes de l’écrivain (ai je encore quelque chose à dire ?), ses sujets de prédilections (l’amour notamment). Instructif, documenté, rempli de plein d’anecdotes !!

Devenir écrivain par Robert Louis Stevenson : trois articles compilés par Elise Argaud, qui signe une préface intéressante sur le mimétisme dans la vie et dans la littérature. Dans le premier texte, Stevenson fait état de son expérience dans le lancement d’un magazine ; le second est tourné vers l’étranger chez lui et traite de la construction de son identité pour terminer sur Le caractère des chiens, critique déguisée de la nature humaine.

Le processus d’écriture est tout nouveau pour moi, au début il était assez instinctif. Il commence à devenir plus construit, plus dans la réflexion. Mon rythme de lecture s’est accentué également et tout prend un jour nouveau, l’œil n’est plus tout à fait le même. Ma boulimie de lecture est clairement lié à mon envie d’écrire, car l’un ne va pas sans l’autre, sauf que pour la première fois de ma vie, je ne lis pas pour trouver la solution, pour avoir toutes les réponses, pour accumuler du savoir, je lis juste pour comprendre et pour m’accompagner.

Lire pour écrire, voilà la clé !

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L’écrivain, témoin de son époque

18 Août

Texte publié pour la première fois sur le site de la Main enchantée le 5 mai.

Il est intéressant de voir comme l’écriture modifie notre regard sur la lecture.

J’ai toujours beaucoup lu (la moyenne nationale est de 12 livres par an, je suis très largement au-dessus), des romans surtout, français essentiellement… Par facilité sans doute, il est plus facile d’entrer dans un univers que l’on connaît, où la toile de fond est déjà tendue. S’attaquer à une littérature étrangère demande davantage de facultés d’adaptation, il faut s’adapter à un ton différent, être prêt à ce que le décor change un peu, que le costume ne soit pas exactement taillé sur mesure.

Longtemps, il a fallu que le livre me touche pour que je le considère intéressant et surtout que je puisse me projeter dans l’histoire donc quand il s’agissait d’un héros tout à fait ordinaire qui se demande si le plus important est de se marier avec la femme qu’il aime ou de rester libre, alors l’identification est aisée, trop parfois.

Depuis peu, mon œil a envie d’autre chose et je pense que cela est lié à l’écriture.

Ecrire vous pousse à vous interroger. Au début, vous faites cela pour vous, vous commencez par griffonner vos états d’âmes et puis vous vous mettez à imaginer des histoires, courtes, qui ressemblent étrangement à votre vie. Et puis, plus vous écrivez, plus vous devenez exigeants, cherchant toujours davantage à vous surpasser, à sortir de cette posture dans laquelle il est rapide de s’enfermer : parler de soi.

Et pour écrire différemment, vous lisez différemment.

J’ai alors croisé le chemin d’auteurs japonais qui par leurs lenteurs, leurs regards différents sur les relations humaines, ont apporté quelque chose de nouveau dans mes lectures.

Mais surtout, j’ai rencontré Russell Banks (une critique ) et là, ma transformation a été complète ou comment un seul livre peut vous ouvrir les yeux sur tant de choses et notamment sur le rôle et la place de l’écrivain.

Le stéréotype de l’écrivain français est un peu romantique, un peu torturé et qui n’a trouvé pour seul échappatoire que l’écriture, quelqu’un qui sonde sa vie, ses ressentis pour tenter de les généraliser et d’attirer le lecteur dans son univers, proposer au lecteur de s’imaginer dans la peau du personnage. (Ce n’est pas une critique, un simple constat!)

Cela fonctionne parfois très bien et certains livres vous transportent et vous bouleversent profondément et intimement (une pensée pour Nos vies désaccordées de Gaelle Josse qui me poursuit encore).

Mais parfois, on a envie d’autre chose ou en tout cas, on se dit qu’il serait bien de ne pas rester dans cette auto contemplation mais qu’il faut s’élever, prendre de la hauteur. Ne pas se contenter de raconter des histoires, mais raconter l’Histoire. Prendre le théâtre de la vie moderne, source inépuisable d’inspiration, pour le tordre dans tous les sens pour en faire sortir la substance.

Un écrivain n’est pas un journaliste et il a cette chance ! Il peut aller très loin dans la critique, analysée la société sous l’angle qu’il souhaite, on ne l’attaquera jamais pour son manque d’objectivité. Avec un roman, on peut tout dire.

La littérature a cela de fantastique,  n’est on finalement pas là dans le dernier véritable terrain de liberté ?

L’adage dit bien que les paroles s’envolent et les écrits restent, mais ceux qui demeurent réellement ne sont-ils pas ceux qui reflètent pleinement une société à un moment donné, qui transcendent le personnage pour aboutir à quelque chose de plus loin, plus haut ?

Ecrire…

13 Août

Texte publié la première fois sur la main enchantée le 18 avril.(Il y a eu du chemin depuis mais je vous laisse l’article, intact!)

Ecrire.

Un simple mot et pourtant une multitude de réalités…

Pour certains, écrire se résume à cette action mécanique que l’on fait tous les jours dans le cadre du travail, pour taper un mail ou pour faire la liste des courses.

Pour d’autres, écrire correspond à une réalité tout autre, à cette autre réalité.

Longtemps, j’ai fait partie de la première partie, je notais cependant des petites idées dans des carnets mais je n’allais pas plus loin ; le second sens me paraissait loin et inaccessible, parce qu’écrire, c’est être (ou se croire) un auteur, c’est s’autoriser quelque chose d’incroyable, c’est avoir du talent.

ecrire

Encore aujourd’hui, c’est presque un secret, comme quelque chose de honteux que je cache à mon entourage ou alors ils sont au courant mais on n’en parle pas, comme quelque chose dont il ne faut pas parler, parce que pour certains c’est une lubie passagère, pour d’autres cela n’a pas d’importance… ou peut être que le problème vient du moi : je ne me trouve pas légitime pour écrire, pour oser penser que mes mots peuvent toucher ou peuvent, mis bout à bout, faire une petite histoire.

Après tout,  les auteurs sont des gens comme les autres et les mystifier n’est sans doute pas si sain que cela… Attention, pas de méprise, je ne prends pas pour un écrivain ou un auteur…

La leçon de cette histoire est sans doute qu’il faut écrire, si l’envie est là ; en faisant sauter barrières et préjugés ; juste écrire car cela nous fait du bien, en éloignant tous les fantômes et entraves qui nous habitent.

Car finalement, les mots ne sont ils pas ce que l’on possède de plus précieux, ce que personne ne peut nous tirer, ils seront toujours là, toujours à disposition…

Ecrire est un acte profondément intime. Pour moi, parfois, les mots viennent sans que je les pense, naturellement, ils sortent comme cela et quand je relis (quel passage douloureux, la relecture !) je ne sais pas expliquer leur genèse, pourquoi tout cela s’est imbriqué comme cela. Je ne suis jamais satisfaite (peut on l’être ? ) mais les faire lire à autrui est source de stress, de fébrilité mais de tellement de chaleur quand les retours sont bons… Savoir que mes mots peuvent toucher est la plus belle récompense aujourd’hui et celle qui me nourrit sans doute le plus à l’heure actuelle.

Les mots vous emmènent dans d’autres univers, ils sont plus forts que la pensée, ils font leur vie, vous font sortir des choses de vous que vous n’imaginiez même pas contenir, ils vous font grandir… Ils sont tout !

Alors, écrivez, tentez l’aventure, faites sauter les verrous, rien de prétentieux dans tout cela, juste de l’envie !!!

Flash.

10 Août

Je vous avais présenté -ici- la jolie maison d’édition Les insomniaques et le projet de revue bi-annuelle: Capharnaum.

J’ai eu la chance d’être retenue pour le dernier numéro.

Un mot: FLASH et ensuite, libre cours à l’imagination.

Voici ma petite contribution, publiée dans cette revue…

Crédit photo: Aurel illus.

Elle était là, comme une machine, aveuglée par les flashs appuyés du photographe. Elle était une bête de foire, une parmi tant d’autres, que l’on délaisserait une fois le numéro terminé et les spectateurs partis. Elle était seule face à l’objectif, à devoir minauder, sourire, ne plus sourire, paraître inaccessible une seconde et la seconde suivante donner l’impression d’être la fille que l’on voudrait avoir comme meilleure amie. Elle faisait son show. Son corps était là évidemment mais son esprit était ailleurs et cela, personne ne le savait.

On la croyait un peu naïve, pas très cultivée, après tout le credo était sois belle et tais toi. On lui avait fait comprendre qu’elle n’était qu’un numéro de plus et que si elle n’était pas docile, on en trouverait une, encore plus jeune, plus belle.

Elle n’avait que 16 ans. On est un enfant à 16 ans et le photographe lui demandait de jouer la femme ; elle n’était qu’une enfant dans la lumière que personne ne prenait le soin d’aimer, de border le soir car, après tout, elle était une star.

Les gens la reconnaissaient dans la rue et au fond, elle l’avait cherché non ? Et puis, le rêve ultime n’était-ce finalement pas d’être célèbre ? Etre célèbre par tous les moyens, les plus abjects, les plus insipides.

Elle, elle rêvait d’autre chose tandis que crépitaient les flashs. On l’avait repérée dans la rue, on lui avait dit mille et une choses flatteuses, sa mère avait trouvé l’opportunité fantastique N’était- ce pourtant pas son rôle à elle de la protéger, de ne pas la voir transformée en objet. Elle voyait pour la première fois les yeux de ses parents briller de fierté, alors elle avait dit oui, sans envie, juste pour faire plaisir.

Mais ce microcosme l’avait happée, personne ne se rendait compte de son malaise tant les gens étaient dans leur monde, hautains et prétentieux, ne dédaignant pas lui accorder un regard. Les autres filles étaient fascinées par ce qu’elles étaient en train de vivre, elles se vendaient littéralement à qui en voulait.

Elle, elle ne rêvait pas de cette vie là…

Elle allait arrêter, lui dire que c’était la dernière séance, qu’elle ne voulait plus que du noir et du silence, qu’elle ne supportait plus ces flashs aveuglants, se voir étalée dans le métro, sur les bus, comme on étalerait une pub pour des yaourts ou du jambon. On l’avait utilisée comme un animal, lui enlevant son humanité, niant ce qui faisait d’elle une fille sensible et un peu trop fragile.

C’en était terminé, elle partirait et ne reviendrait pas, prendrait l’argent des photos et s’enfuirait loin de tout, de cette société qui consommait des corps et des images. Cette orgie visuelle, qui ne donnait sa place qu’aux cyniques et aux ambitieux, où l’individualisme avait tout englouti. Loin de ses parents qui n’avaient jamais pris la peine de l’écouter. Loin de ce garçon qui avait cru pouvoir jouer avec elle.

Elle partirait, elle éteindrait la lumière… définitivement.

La douleur de l’insatisfaction

25 Juil

Si lundi, les mots étaient légers. Aujourd’hui, ils sont plus lourds. La vie quoi! Ces petits textes sont écrits rapidement, pour justement sortir ce qui me dérange. Je ne sais pas s’ils méritent d’être publiés sur le blog, mais je ne m’interdis rien ici, c’est mon espace de liberté!

Parfois, elle pensait la victoire acquise. Enfin ! Elle avait réussi à la dompter. Elle savourait alors cet instant suspendu, une minute, une heure, parfois une journée. Toucher du doigt la sérénité. Respirer la chance d’être en vie.

Illusion.

Inlassablement, inévitablement, elle revenait.

Une perverse.

Tapie dans un coin, elle refaisait surface, toujours plus violemment, ne prenait plus les détours qui la rendaient moins vive, elle apparaissait pleinement, sans retenue.

Brutale.

Elle lui enserrait le cœur, lui nouait l’estomac. Elle privait d’air ses poumons et tournoyait dans sa tête, au point de la forcer à fermer les yeux pour que cela fasse moins mal.

Alors, à chaque fois, elle savait qu’il faudrait encore se battre. Un combat vain. Un de plus.

Une lutte qui laisserait une blessure mais qui offrirait un instant de répit.

L’accepter aurait été la solution, mais elle n’y parvenait pas.

Alors, dans ces moments, elle se détestait. Elle avait tout alors elle ne pouvait pas se plaindre. Elle se retenait de ne pas hurler, de ne pas tout envoyer en l’air et courir loin, jusqu’à ce que le corps ne tienne plus, expulser cette douleur.

Rien n’y faisait. Elle ne saurait jamais la faire taire.

Elle ne serait jamais rassasiée, entière. Il y aurait toujours une place en elle pour ce poison qui tout à coup la sortait de sa douceur pour la plonger dans ce sentiment d’étouffement, qui lui donnait l’impression de vivre à côté de son corps. Elle se voyait souriant aux gens, faisant ce qu’on lui demandait de faire sans rien laisser paraître.

Epuisant.

Elle allait se battre encore une fois, existait-il une autre solution ?

Il fallait vivre avec.

Elle était sa douleur. Elle était son moteur. Sans elle, elle n’aurait sans doute rien accompli.

Mais à quel prix ?

L’insatisfaction permanente, l’impression de nager à contrecourant et parfois de se noyer quand le sas de sortie ne s’ouvrait pas, le déchirement permanent entre raison et passion étaient les fardeaux qui parfois lui revenaient en plein cœur. Tout était figé dans cette boule qui surgissait et qui ravageait tout sur son passage, qui transformait la plume en acier, le sourire en larmes.

Elle allait lutter une fois encore, il le fallait, lutter encore contre la douleur de vivre ainsi.

Juste quelques mots jetés sur le papier…

23 Juil

Je reprends doucement mon crayon. Il faut que je me détache petit à petit de ces personnages qui hantaient mes nuits et tourmentaient mes jours, qui ne se sentaient libres qu’une fois que je leur offrais des mots. Mon crayon était contraint de les contenter, pas de place pour autre chose. Maintenant qu’ils sont un peu éloignés, je reprends mon carnet et griffonne quelques mots. Rien de construit, juste le bonheur de voir le crayon courir à nouveau sur la page… Je vous partage mon dernier petit texte, juste comme ça, en passant…

Crédit photo: MaxMet

Marie descendit l’escalier sur la pointe des pieds. La maison était silencieuse, calme, comme elle l’aimait. Rien qu’à elle. Tout semblait pris dans la douceur de la fin de nuit. Dans un instant, tout se réveillerait, chaque chose allait reprendre la place qu’elle devait occuper. Pour le moment, tout était silencieux, bercé par cette douce lumière que la fenêtre ne pouvait retenir.

Elle enfila son gilet et sortit. Le silence, quelques cris d’oiseaux ici ou là, rien de brutal, simplement l’éveil du jour. Le soleil avait décidé de se montrer. Elle avança pieds nus dans la pelouse encore recouverte de rosée. Elle caressa le tronc de l’olivier à l’ombre duquel elle lirait un livre cet après midi, après un repas rempli des saveurs de l’été. Peut être s’endormira t-elle portée par les mots qu’elle aura savourés.

Elle aperçut quelques fraises rouges qui viendront combler les papilles de Manon, lorsqu’elle viendrait, cet après midi, jouer à la grande avec son seau et sa petite trousse de jardinage.  Elle chapardera ces fraises en jurant, la bouche rouge et sucrée, que ce n’est pas elle. Marie sait déjà qu’elle la prendra dans les bras pour la faire tournoyer dans les airs, qu’elle la bercera ensuite, qu’elle l’enivrera de câlins et qu’enfin elle lui dira combien elle l’aime.

Elle s’assit sur le petit banc au bout du jardin. Juste un instant pour elle, pour savourer le fait d’être en vie. La vie est chaotique, n’est parfois qu’un long tunnel sombre et puis un jour la lumière. Enfin, trouver cette place que l’on doit occuper, mettre fin à cette quête existentielle si difficile.

Elle savoure cet instant en sachant que demain sera différent, plus compliqué, plus difficile, chaque jour ne peut pas offrir le même lot de bonheur.

Marie aurait voulu savoir se contenter de ces instants, peut être fallait il vivre les jours sombres pour que justement une fois le bonheur présent, on sache le reconnaître.

Ce matin, elle aurait voulu arrêter le temps, figer cette douceur, s’en remplir pour ensuite continuer. Se faire la promesse que l’essentiel est là et qu’il ne sert à rien de courir après des chimères et des mirages. Les promesses n’engagent que ceux qui y croient et elle ne pouvait s’en contenter. Elle continuerait à douter, à toujours vouloir plus. Mais aujourd’hui, Marie allait profiter de son bonheur, ne pas penser à l’avant ni à l’après, juste être là dans le présent. Il était trop tard pour refaire le passé et l’avenir n’est que du sable que nos doigts ne peuvent retenir, il n’y a que le présent qui compte et aujourd’hui, elle allait se donner l’illusion d’y croire.

Elle se leva du banc, rentra dans la maison et vit apparaître en haut de l’escalier Manon, son ours à la main, les cheveux en bataille, le regard rempli de sommeil. Elle descendit l’escalier marche par marche, pour venir se blottir contre Marie, lui réclamant d’une petite voix son bol de chocolat. Marie lui sourit et l’embrassa, lui caressa les cheveux et lui murmura qu’elle l’aimait. Manon la regarda, avec cette mou concentrée qui la caractérisait parfois et sans que Marie ne s’y attende, lui dit : « tu sais, maman, je crois que la vie est belle. »

Une larme. Un sourire. Tout était dit.