« J’ai été sage toute ma vie, crois moi, ça ne sert à rien.
1964. Stan, paléontologue. Umberto, le vieil ami. Gio, le guide. Peter et sa marionnette Youri.
Un rêve fou de dragon. Une expédition en montagne à la poursuite du rêve.
Après nous avoir fait rencontrer l’inoubliable Shell dans son premier roman Ma reine, Jean Baptiste Andréa nous offre à nouveau des rencontres fortes dans son deuxième roman, au si beau titre, Cent millions d’années et un jour.
Le monde, ce qu’il a été, ce qu’il contient.
Et un jour.
Ce jour, comme le seul qui compte, celui où le possible est à portée de mains. Comme pour Ma reine, Jean Baptiste Andréa tire le fil des thèmes qui lui semblent chers. La nature, ici plus abrupte, l’enfance comme absolu, les êtres en marge de ce que la société ordonne, et la capacité de l’imaginaire à enchanter la vie.
Mais, ici, tout est plus minéral, comme si le voile de douceur s’effaçait pour laisser place au brut, à ce qui reste quand on se rapproche de la vérité, quand le rêve qui creuse son antre dans les tripes se dénude pour être mis à jour.
A fouiller l’essentiel, Jean Baptiste Andréa redouble de poésie et tisse avec sa langue sensible et sensorielle un monde que l’on quitte à regret, en se prenant à inspecter ses envies secrètes pour leur donner, même aux plus folles, la place qu’elles méritent.
« Lui avouer qu’à cinquante-deux ans, je cousais encore mon nom au revers de mes pulls parce que ma mère m’avait expliqué que, comme ça, elle me retrouverait toujours. »
Et si les rêves et notre enfance étaient les deux choses qui nous définissaient le plus ? Au milieu de son expédition, plus que ces compagnons de voyage, ce sont les souvenirs de son père autoritaire et de sa mère qui guident Stan, qui le révèlent aux lecteurs dans sa complexité et ses manques, dans son rapport aux autres et à sa quête. Il n’est pas question des clichés qui jalonnent souvent le rapport à l’enfant mais plutôt des sensations qui l’habitent, de cette capacité d’être à l’instant présent, des sensations sans filtre et de la faculté à croire en tout.
Ce livre est beau, beau à pleurer comme devant un paysage qui coupe le souffle, comme quelque chose de plus grand que soi.
Il y a un peu de chacun de nous dans ces pages, de l’enfant qui jamais ne laisse en paix l’adulte devenu, de la folie avec laquelle on flirte aux yeux de la norme quand on ne suit pas un chemin tracé, de la quête sans fin qui donne à chaque jour qui s’écoule la raison d’attendre le suivant.
Jean Baptiste Andréa confirme son talent d’écrivain, dans sa capacité à créer des atmosphères singulières, à creuser les questions essentielles en offrant du romanesque et à créer du beau.
Il est un auteur qui compte, et à suivre, indéniablement.
« La prochaine fois que l’aube me secouera, je n’ouvrirai pas les yeux. C’est un piège. L’aube ment à ceux qu’elle réveille, à l’homme d’affaires, à l’amoureux, à l’étudiant, au condamné à mort et, oui, au paléontologue aussi. Elle nous remplit d’espoir pour mieux nous décevoir. Le crépuscule, plus vieux et plus sage d’une journée, m’a fait la leçon : j’ai été bien naïf de la croire. »
Hâte de le recevoir et de le lire !
Quelle belle chronique !!! J’ai hâte de le découvrir 😉