Les fictions radiophoniques, par Sophie Lemp. Un univers à découvrir.

27 Mai

C’est par Le fil, son premier roman, que j’ai découvert l’écriture et la sensibilité de Sophie Lemp. Non rassasiée, je voulais retrouver cette langue et ces émotions qui me parlent tant, et j’ai découvert un univers, le sien mais aussi celui de la fiction radiophonique, à travers son adaptation d’Annie Ernaux (rediffusée à compter de lundi à 20h30 sur France Culture), ses superbes Vers la mer et Dans les allées du jardin des plantes (Le si prenant souvenir de Suzanne)  ou encore Billie Holliday.

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Le mardi 31 mai, sur France Culture,  sera diffusée sa nouvelle production, l’adaptation d’un roman d’Yves Simon, La dérive des sentiments (Prix Medicis, 1991).

Coincée entre l’absence de souvenirs d’un passé récent et un no future autodéclaré, la jeunesse des années 90 que décrit La Dérive des sentiments ressemble étrangement à celle d’aujourd’hui. La Dérive des sentiments est une traversée, troublante parfois, une variation sur l’écriture, un livre empreint de nostalgie mais résolument moderne. (Pour plus d’informations, n’hésitez pas cliquer sur le logo ci dessous).

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A cette occasion, elle a répondu à quelques questions sur la conception d’une fiction radiophonique.

Comment en vient-on à écrire des fictions radiophoniques ?

Pour ma part, c’est en travaillant comme comédienne pour la radio que j’ai découvert cet univers, tout de suite adoré. Un réalisateur qui savait que j’écrivais m’a mis le pied à l’étrier en me présentant les bonnes personnes. J’ai commencé par adapter, puis j’ai également écrit, de courts feuilletons pour l’émission « La vie moderne » et tout récemment un feuilleton de cinq épisodes de 25 minutes sur Billie Holiday.

Est-on plus proche du théâtre, du roman lu ou est-ce un style totalement atypique ?

Cela dépend, tout est possible ! Certaines fictions sont plus proches de la littérature, d’autres du théâtre, certaines ressembleraient presque à un scénario de cinéma. Mais leur point commun est qu’il faut qu’en lisant le texte on pense radio, c’est à dire ambiance sonore, musique, bruitages. Cela doit avoir un sens de le mettre en ondes. On ne devient pas fiction radiophonique par défaut.

Comment adapte-t-on un roman dans un format bien défini, une réécriture, des choix d’extraits, une orchestration différente ?

 Tout commence par le choix du livre adapté. Quand j’aime un ouvrage et qu’en le lisant je « l’entends », je sais en général assez intuitivement s’il pourrait devenir un unitaire d’une heure ou plutôt un feuilleton. Une fois ce format défini, en accord avec France Culture, je commence à travailler, d’une façon presque différente à chaque fois. Quand j’ai par exemple adapté Les Années, d’Annie Ernaux, je n’ai bien évidemment pas touché à l’écriture, il s’agissait davantage d’un découpage, d’une mise en voix, de choix qui permettaient au texte de devenir un feuilleton en dix épisodes. Pour d’autres projets, je me suis permis davantage de liberté, j’ai dialogué des passages qui ne l’étaient pas, ou au contraire converti certains dialogues en narrations, j’ai supprimé des personnages, ajouté des scènes.

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Dans une adaptation, on a une matière solide sur laquelle s’appuyer mais il y a toujours une part très forte de subjectivité. Quand un roman de 250 pages devient une fiction d’une heure, il y a forcément des choses du livre que l’on abandonne en chemin, d’autres que l’on est parfois obligé d’inventer. Il y a donc tout un travail de (re)création.

Quels sont les intervenants pour la confection d’une pièce radiophonique ?

Le point de départ est souvent une conversation avec l’une des conseillères littéraires de France Culture. Elles sont trois, en charge de différentes émissions, l’ensemble du service étant dirigé par Blandine Masson. Les idées peuvent venir de l’auteur comme de l’une d’entre elles. Elles accompagnent ensuite l’écriture ou le travail d’adaptation, en se penchant régulièrement sur le texte en cours. Une fois qu’une version est jugée aboutie, elle est proposée à un réalisateur. Ils sont une petite quinzaine à être habilités à réaliser des fictions. Quand l’un d’eux accepte un texte, il prend ensuite tout en main : choix des comédiens, de la musique, des ambiances. L’auteur/l’adaptateur n’intervient plus alors que ponctuellement, essentiellement pour couper certaines scènes trop longues, parfois pour réécrire certains passages. Pendant l’enregistrement puis pendant le montage et le mixage, le réalisateur est accompagné par une équipe technique essentielle : un ingénieur du son, des techniciens, un(e) assistant(e)… Ensemble, ils fabriquent ce qui deviendra au bout de quelques semaines une fiction radiophonique.

Pourquoi écouter une fiction radiophonique ?

Écouter une fiction radiophonique, c’est s’accorder un moment, un moment à soi, où l’on s’arrête un peu, où l’on prend le temps d’écouter, écouter et imaginer. Cela permet parfois de redécouvrir un livre que l’on a aimé – sans ce qui nous gêne parfois au cinéma, cette façon d’imposer des visages à des personnages que l’on imaginait tout autres – ou de découvrir un auteur, un univers. C’est comme entrer dans une bulle, une bulle qui ne ressemble à rien, une bulle sans écran, sans images, juste des mots, des sons, des voix et des histoires.

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Je ne peux qu’aller dans le sens des propos de Sophie Lemp, l’écoute de ces fictions est un temps particulier, comme ces histoires qui nous berçaient petits, un instant où porté par les mots, les yeux fermés, on s’imagine les décors, les visages et les couleurs. Laissez vous guider…

Découvrez sans tarder les fictions de Sophie Lemp et rendez vous le mardi 31 mai pour La dérive des sentiments ou en podcast dès le lendemain, sur France Culture. ou à partir de lundi à 20h30 pour la rediffusion de sa fiction adaptée du roman Les années d’Annie Ernaux.

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2 Réponses vers “Les fictions radiophoniques, par Sophie Lemp. Un univers à découvrir.”

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