Electrochoc! (bis)

14 Mar

Billet déjà publié le 30 août 2012( pour cause de vacances, les billets de la semaine du 11 au 17 mars seront des rediffusions!)

Sur certains livres, il faudrait apposer un bandeau comme pour prévenir : attention, ce livre est vivant, vous n’en sortirez pas indemne.

Il en est ainsi pour des romans, ceux qui changent une vie sont rares mais ils existent. Fermer un livre et se rendre compte que sa perception de la vie a changé d’axe ou a bougé, même légèrement, c’est que le pari lancé par l’auteur est gagné.

Et même s’ils vous bouleversent, ce sont des romans alors vous pouvez vous dire que ce n’est pas la vraie vie, un peu comme dans les comédies romantiques où tout est parfait et où l’on sait que dans la vie ce n’est pas tout à fait ça. Vous trouverez des excuses au fait que vous ne changerez pas de vie demain. Ce n’est qu’une histoire… Sauf qu’ils s’accrochent, qu’ils résistent et qu’un jour, tout ce que vous aurez emmagasiné débouchera sur quelque chose. La lecture change la vie, c’est indéniable.

Alors, quand vous ouvrez un livre que vous savez correspondre à la vie, la vraie, que les auteurs sans détour vous livrent leurs blessures, vous ne pouvez pas vous draper derrière le voile de la fiction.

Et là, attention, ça peut être dangereux, décapant et détonant. Trop vraie, trop proche, trop semblable à du vécu.

C’est rassurant un temps : vous n’êtes donc pas seule à penser comme ça et puis après c’est effrayant car lire ce que l’on ressent, c’est comme un coup de poing dans le ventre. A la fin, vous fermez le livre, sonnée et en vous disant que vous venez de vous brûler un peu les ailes, qu’il ne faut pas atteindre l’extrême que vous lisez dans ce livre et pourtant vous sentez qu’il s’approche doucement, furtivement. Ce sont peut être des bouées de sauvetage que l’on vous lance sur votre route…

Le premier de ces livres est un conseil de lecture de Sophie Lit. Un conseil et quel conseil !

J’ai déserté le pays de l’enfance de Sigolène Vinson.

Un titre qui tout de suite me happe, ma fameuse longue histoire écrite depuis quelques temps maintenant contient une phrase quasiment similaire…

Ensuite, la quatrième de couverture et là un vertige : ces mots auraient pu être les miens… Ce constat me colle à la peau…

Je rêve d’autre chose…
La vie d’adulte, en nous mettant un métier et un salaire entre les mains, brade nos souvenirs, remise nos idéaux, raille nos folies de jeunesse. Un jour pourtant, l’enfance se rappelle à nous, cette époque où l’on était quelqu’un, où l’on était sûr de le devenir.
Avocate à Paris, S. V. supporte de plus en plus mal les compromis, les trajets en métro, les ciels gris et sa robe noire.

 Mais le pays de l’enfance que l’auteur déserte ce n’est pas seulement le pays des illusions et de la douceur, c’est Djibouti :
Loin, à la Corne de l’Afrique, il y a Djibouti, qu’elle a déserté à la fin de l’enfance. Le pays des braves, des pêcheurs, des bergers, de la mer et du vent. Une terre d’aventuriers où séjournèrent Arthur Rimbaud, Henry de Monfreid, où l’on raconte qu’accosta Corto Maltese. Un ailleurs où elle doit revenir pour ne pas mourir bête, pour ne pas mourir singe, le pays du premier homme, des origines et des possibles.

Même si vous n’êtes pas dans ce schéma là, ce livre est à découvrir, pour la violence qu’il dégage, pour les mots si bien posés sur le monde d’aujourd’hui, sur sa folie et sur la pression que la société peut exercer et parce que tout le monde a été cet enfant, bercé d’illusions.

Un livre à l’écriture brute, à l’écriture pure. Aucun compromis. Tout est dit. Pas de détours, pas de précautions. Violent et vivant!

Ce livre est un cri, un cri animal qui résonne longtemps, un cri pour que l’humain retrouve toute sa place, pour arrêter de faire semblant.

Un électro choc ! Merci Sigolène!

Peu de temps avant, je venais de finir la lecture de L’autre moitié de moi  même d’Anne Laure Bondoux. Anne Laure est une écrivain pour la jeunesse, en panne d’inspiration et qui tombe peu à peu dans une dépression, jusqu’au jour où elle pense avoir renversé un enfant en voiture.

Mais l’enfant n’existe pas, ou plutôt n’existe plus. C’est elle qu’elle a renversée. Un fantôme.

Commence alors une recherche sur son passé, sur cette vie en apparence normale et qui pourtant laisse une faille chez la femme devenue adulte.

Un livre comme une confession sur la blessure laissée par l’enfance, sur cette colère que l’on peut porter en soi sans savoir d’où elle vient.

Un livre confession émouvant et profondément touchant.

Ces deux livres ont eu un retentissement fort en moi, comme un boomerang à mes doutes, comme si Anne Laure et Sigolène avaient voulu me prendre par la main pour m’obliger à voir l’avenir, à me dire que les questions ne peuvent être occultées sans risquer de ressortir, brutales et mordantes.

Des livres déroutants et bouleversants qui vous forcent à ouvrir les yeux… sans doute pour votre bien !

A peine remise de mes émotions, j’ai lu un roman cette fois qui fait partie de ces quelques romans qui peuvent changer une vie, je vous en parle la semaine prochaine!

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11 Réponses vers “Electrochoc! (bis)”

  1. Céline☼ 30 août 2012 à 08:29 #

    Merci pour ces deux superbes conseils ! Je note les deux.

  2. Sophielit 30 août 2012 à 09:18 #

    Je suis tellement contente que tu aies accroché à « J’ai déserté le pays de l’enfance »… Vivent les livres !

  3. christine 30 août 2012 à 10:10 #

    Je les retiens!
    J’ai déjà eu des sensations comme celles que tu décris, de larmes ou de joies.

  4. clara 30 août 2012 à 11:12 #

    Vilaine tentatrice:)!

  5. lucie38 30 août 2012 à 20:17 #

    ro là là j’avais décidé d’être raisonnable et de lire les livres qui sont dans ma biblio, mais là je peux pas résister !!

  6. Ines 31 août 2012 à 15:22 #

    Tout comme Lucie, j’avais prévu de ne plus trop me laisser tenter et d’avancer dans les livres qui m’attendent dans ma bilbio, ms là, tu me donnes sacrément envie, je suis bien tentée surtout par le 1er!!

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